jeudi 25 février 2010

Rio Gagallegos (ce n'est pas une faute de frappe).

Où allons nous?
D'où venons nous?
J'ignore de le savoir
Mais ce que je n'ignore pas de le savoir
C'est que le bonheur
Est à deux doigts de tes pieds
Et que la simplicité réside dans la courbe
Bleue, jaune, mauve et insoupçonnée de nos rêveries.
Les Inconnus. Vice et Versa.

Belle citation. C'est exactement ce que je me disais moi-même dans mon désespoir hyperbolique du symbole asynchrone de mes visions aluminées et pourpres de paradoxes réciproques. Tout ça et aussi que si je reste beaucoup plus longtemps à Rio Gallegos je vais devenir fou.
Bon rien de vraiment neuf dans l'avancement des travaux mécaniques, mais je ne peux plus rien faire. Je voulais transporter la moto à Bahia Blanca pour la réunir avec le moteur, dans le plus pur style «Si tu ne viens pas à Lagadère, Lagardère viendra à toi». Mais il parait que mon moteur est parti de Bahia Blanca. Je ne sais pas comment ils l'ont expédiés et il n'y pas moyen d'obtenir de numéro d'expédition ou rien du genre.
Tout va bien quoi!



En faisant du stop j'ai vu beaucoup de ses rapaces sur le bord de la route. Je me suis à un moment donné dit que si personne ne s'arrêtait pour me ramasser j'allais finir comme dessert à des charognards du désert.



Rio Gallegos c'est un peu ça...

Ses couchers de soleil (tous les soirs, il y en a un, si! si! Mais pas toujours aussi joyeux). Je suis en Patagonie depuis tellement de temps que j'ai franchement noté à quel point les jours réduisent.




Ses poubelles très originales.
Ses HLMs.
Si vous tombez en panne à Rio Gallegos, ÉVITER cet atelier.
Son cimetière de trains.
Ses entrepôts en déréliction.
Ses épaves.
Ses camions de pompiers vieux de 50 ans.
Ses Renault 12.
Et ses épaves de Ford Falcon.

lundi 22 février 2010

Une petite marche, pour se changer les idées.


Au matin de la fin de ma première semaine d’ennui mortel à El Calafate je fus réveillé de fort bonne heure par la petite française qui dormait au dessus de moi (on s’entend bien : dortoir avec lits superposés, j’en connais qui vont s’imaginer des choses!). Elle avait un bus à prendre pour Puerto Natales. Je jetais un rapide coup d’œil derrière le rideau de jute orange délavé qui me masquait le ciel et me permettait cette performance renouvelée de rester au lit jusqu’à dix heures du matin. Performance qui n’aurait pas dû être difficile à accomplir étant donné que j’étais sorti la veille avec mes deux autres compagnons de dortoir, de jeunes chiliens très agréables de fréquentation et avec qui j’avais éclusé quelques Quilmes. Couché à trois heures du matin, bonne moyenne.

Sauf que là, tout ce que je vis par le carreau au verre rayé par trop de voyageurs curieux de connaître la couleur du ciel, c’est un rectangle d’un bleu limpide et profond. Pas la trace d’un seul nuage ne venait ternir cette image idyllique. L’idée est arrivée assez brusquement. Belle journée pour retourner à EL Chalten et enfin voir d’un peu plus près ce fameux gros caillou qui fait fantasmer tant de grimpeurs. À sept heures vingt cinq je sautais prestement du lit. D’accord, pour la justesse du propos disons plutôt que je me traînais jusqu'à la salle de bain en me préparant mentalement à une journée d’auto stop supplémentaire. L’accomplissement de cette première fonction biologique de la journée me permettait de penser un peu plus clairement. Oui, moi ça me fait cet effet là!

Le temps change de manière drastique en peu de temps dans les environs, et s’il me fallait la journée pour me rendre jusqu’à El Chalten je courrais le risque de ne trouver que nuages et pluie le lendemain. Je passais en surmultipliée et à sept heures cinquante cinq j’étais en ligne au guichet de la compagnie de bus, à huit heures moins deux j’étais possesseur d’un billet pour le bus de huit heures, dans lequel je me pressais de prendre place.

J’arrivais avant midi au village connu mondialement comme la capitale argentine du trekking. Trouvais l’auberge la moins chère du coin et y déposais mon sac pour me lancer sans tarder vers les huit heures de marche pour aller et revenir au Lago De Los Tres, qui offre une vue imprenable sur le Fitz Roy. Je ne fus pas déçu de mon choix. Un peu inquiet au départ de me lancer seul et sans équipement dans cette randonnée pédestre, je me rassurais assez vite. Le mot trekking est un peu usité à tort et à travers ces temps-ci. Il est passé où le temps où cela signifiait aventure, danger, risques en tous genres?

Le chemin n’a pas besoin d’être balisé. Il est passé tant de milliers de randonneurs que la trace laissée est une tranchée d’un bon cinquante centimètres de profondeur qui aurait ravie n’importe quel poilu de la grande guerre.

Mais quelle magnifique balade! Étant seul j’entretenais naïvement l’idée d’avoir la chance de voir un puma ou des huemuls égarés. Il n’en fut pas question et je ne vis que quatre ou cinq vaches, du type assez commun qu’on retrouve un peu partout dans le monde (enfin pour ce que je connais du monde en général et surtout des vaches en particulier).

Cette partie de la vallée est verdoyante à souhait et la majorité de la marche se fait sous le couvert d’arbres feuillus peu variés mais abritant bien du vent et entretenant ainsi une tiédeur bienfaisante. La majesté du Fitz Roy n’est certainement pas une invention et il est facile de voir l’attraction qu’il crée. Il se dresse au milieu des vallées avec cette couleur caractéristique et pourtant tout le temps changeante. Chaque mouvement du soleil déplaçant habilement les ombres sur les glaciers et donnant à la pierre des nuances allant du gris à l’ocre. Mon seul regret est de ne pas avoir eu ma tente et mon sac de couchage, restés avec la moto à Rio Gallegos. La camping autorisé par endroit le long de la piste permet une vue qui doit se révéler magique lorsque le soleil se lève sur le Fitz Roy.

De retour à l’auberge, je retrouvais Grant. Venu de Vancouver à moto, il était aussi sur le voilier qui nous passait du Panama à la Colombie. Je n’avais pas vu Grant depuis Cartagena et ce fut agréable d’échanger sur nos expériences de route depuis notre arrivée en Amérique du Sud.

Le lendemain je voulais le consacrer à la virée du mont Torre, mais les nuages s’étaient invités pendant la nuit. Le Torre s’était ganté d’un nébuleux gant cotonneux et dissimulait ainsi son doigt tendu vers le ciel. Je faisais donc la promenade au Loma del Pliegue Tumbado qui offre une vue magnifique sur les vallées alentours. De ce côté de la montagne on se retrouve vite à découvert et le vent se levait en début d’après midi rendant l’air vivifiant. Oui, froid quoi!

Me restait à retourner à Rio Gallegos en auto stop, vérifier de visu le manque de progrès dans le dossier motocyclette.



Je ne suis pas le premier à passer par là, on dirait.
Le Fitz Roy (j'en ai environ 350 des photos dans le style, en voilà un échantillon).



À l'extrême gauche de l'image pointe dans son érection inflexible l'aiguille de St Exupéry. Plus petites, mais pour le même hommage, un peu plus loin sur la droite (et hors cadre!), on retrouve les aiguilles Guillaumet et Mermoz.
Le glacier Piedras Blancas.





La trainée d'un avion griffe le ciel derrière le Fitz Roy.


Le glacier Grande et la lagune Torre.




vendredi 19 février 2010

Au sud rien de nouveau.

Encore une semaine totalement infructueuse qui s’achève. Je suis toujours à El Calafate. J’essaye de battre mon record qui consiste à rester au lit le plus longtemps possible. Pas facile. Je suis arrivé à 15 heures (pas d’affilées, trop éprouvant pour les nerfs!). Entre les passages à l’horizontal, je mange des plats en sauce que je m’occupe à cuisiner. Pas de doute que je vais reprendre les quelques kilos que j’ai perdus durant le voyage. Le seul défaut de cette technique est que j’emmagasine tout autour de la ceinture abdominale. Si on rajoute le fait que je me lave les dents 6 fois par jour (très ludique comme occupation!), on arrive à 24 heures, soit une journée de plus de perdue.

Dernière nouvelle de mon super mécano : encore une semaine avant que le moteur ne revienne à Rio Gallegos. Sincèrement je me perds en conjecture. La solution la plus logique est que je sois en train de me faire arnaquer. Mais, étant d’un naturel naïf, j’essaye de me convaincre que j’ai juste à faire à des imbéciles incompétents. Donc nous voilà passé de quatre jours initialement à trois semaines complètes, et c’est sûrement pas fini. Je me vois encore ici pour noël, moi. Dernière conversation téléphonique aujourd’hui avec le suspecté malhonnête larron. Mensonges encore plus gros que la dernière fois, je m’énerve encore une fois, puis finalement le chat sort du sac. Il me demande si je connais la procédure pour vendre légalement la moto en Argentine. Nous y voilà donc! Je ne sais pas si je me suis fait bien comprendre cette fois-ci, mais il a eu sa chance d’acheter et maintenant que j’ai entamé la procédure que nous intitulerons faute de mieux : «réparations», pas question de faire machine arrière.

Donc rien d’intéressant à vous narrer. Je fais déjà parti des meubles dans cette auberge, j’essaie juste de ne pas trop prendre la poussière. J’y vois défilé comme des comètes des voyageurs de tous horizons. Français, allemands, chiliens, argentins, chinois, italien, portugais, suisses, belges, britanniques, monténégrins (c’est plus rare), hollandais, américains et bien d’autres.

Et moi je suis là, planté comme un légume. Au gré des hasards j’engage des conversations avec certains d’entres eux. On parle de tout, du futile à l’intéressant, ce rôle ne me convient pourtant pas. Pas moyen de sortir de mon esprit ce problème qui m’immobilise ici en me demandant si j’ai pris les bonnes décisions au bon moment, semblant condamné à finir ce voyage sur une note tellement discordante que son grincement à mes oreilles terni tout le voyage.

Je n’ai pas pris d’autres photos, mais voici deux liens vers des sites de voyageurs que j’ai rencontré récemment.

Gilles, motard québécois sur la même route que moi, qui remonte d’Ushuaia (heu! Avec un peu plus de succès mécanique et sur une plus ample durée avec le double de kilométrage jusqu’ici).

http://www.americasonbike.spaces.live.com/

Laura et Wagner qui en sont à 9000 kilomètres à vélo depuis avoir quittés leur Costa Rica natal. Un site avec des photos exceptionnelles, qui me font même rêver, moi qui suis passé dans la plupart des endroits qu’ils ont traversés, c’est tout dire. En prime ils sont très gentils.

http://suramericaencleta.com

mercredi 17 février 2010

Les nerfs à vif.

Les trois jours précédents mon départ de Rio Gallegos pour Ushuaia avaient été bien occupés. Par la recherche d'une solution pour mon moteur. J'ai cherché, suivi des fausses pistes, fait face à d'autres arnaques et finalement j'ai cru voir la lumière au bout du tunnel. J'ai trouvé le moyen d'expédier mon moteur à Bahia Blanca pour le faire refaire. Avantageux, car le prix de cette opération est seulement un tiers de la réparation proposée par Yamaha. Arrangement avec un garage moto local pour qu'il récupère le moulin et le remette dans le cadre. Prix fixé au départ, durée de l'opération prévue: quatre jours. Parti six jours à Ushuaia, je pensais que j'étais bon pour retrouver un véhicule en état de marche près pour la suite.
Bien non, évidement que non! On refuse de me dire où est mon berlingot. Demande de plus d'argent pour d'autre pièces apparemment nécessaires, pas de date, mais délai plus long requit.
Je me suis un peu énervé dirons nous.
Oui, d'accord, j'ai pété les plombs.
Je suis retourné trois fois dans la journée voir le bien honnête commerçant qui tenait ma moto en otage. À la troisième visite, léger déblocage. Comme par miracle toutes le pièces sont arrivées et à Bahia Blanca on a commencé à travailler sur mon moteur. Par contre, il ne sera prêt que dans environ 6 jours, soit près de trois semaines après qu'il m'est lâché vers El Calafate. Quelle guigne! J'aurais vraiment dû la brûler la semaine passée cette moto.
Rio Gallegos est trop chère et trop ennuyante. Je retourne vers El Calafate. En espérant que cette fois-ci la réparation sera complété à mon retour. Non, je n'y crois pas, mais là j'ai plus vraiment de choix, j'ai déposé une avance pour la réparation qu'il n'est pas question de me rendre.
Toutes les activités sont hors de prix dans le sud de l'Argentine, alors je marche dans les environs et prends quelques photos. Pas mal de chance avec la faune, notamment avec la chance de voir deux condors fendre avec majesté les cieux de leur vol paresseux.
Épuisant pour les nerfs cette attente ridicule, cet ennui de rester sur place dans le doute et surtout la possibilité que l'on me sorte encore d'autres excuses et mensonges entraînant d'autres délais et des frais surprises encore plus extravagants.

Il y a quelques semaines, sur la route 40 je passais par El Chalten. Je ne m'attardais pas car les nuages masquaient complétement le mont Fitz Roy. Avec une belle journée comme celle là on peut le voir de El Calafate. À droite le Fitz Roy, à gauche le mont Torre.

Le glacier Perito Moreno.
Cliquer sur la photo pour l'agrandir. Le point noir au milieu est un condor.










Renard gris.

La fameuse roche dite du Sombrero.

Un piaf a plastron.

Un ibis.



Un lièvre.